Dépaysement japonais

Dans les pays précédemment traversés, une ou deux semaines d’acclimatation nous avaient à chaque fois permis de trouver nos marques. Au Japon les choses sont plus complexes. Après un mois, nous restons souvent dans l’incertitude tant les choses nous paraissent fonctionner si différemment de chez nous.

Dans les assiettes

Le Japon, plus que tout autre pays, semble s’être développé sur une voie parallèle en restant plutôt hermétique aux influences extérieures. Ainsi dans les magasins il est difficile de trouver des produits alimentaires qui ne soient pas typiquement japonais. Adieu le Nutella ou apparenté trouvé pourtant partout ailleurs. Nous n’avons bien évidemment toujours pas retrouvé nos bons fromages. Même les chips tels que nous les connaissons sont remplacés par des crackers de riz soufflé. Une exception cependant pour les petits déjeuners : il est possible de trouver du pain à toaster en tranches épaisses, des confitures et crèmes à tartiner de diverses saveurs. A côté de cela les magasins regorgent de produits inconnus dans nos contrées : légumes fermentés, à base de soja, sauces d’accompagnement ou culinaires ou simples légumes aux formes et couleurs étranges…

A noter que les fruits et légumes frais sont hors de prix. Les pommes de terre, carottes et oignons sont vendus à la pièce, les asperges dans des bottes de trois ! Le prix du melon est surréaliste entre 8 et 10 € et la mandarine à 1€ pièce.

Parallèlement à cela nous découvrons de délicieux produits surtout dans la gamme des sucreries et desserts dont les japonais semblent très friands. Par exemple les mochis (pâtes de riz fourrées avec de la purée de haricots rouges), Kit Kat au thé vert, gelées de fruits. Leurs chocolats et bières pils n’ont rien à envier aux nôtres pour un prix similaire.

Très bonne surprise pour les voyageurs au long cours et donc à budgets serrés: les bentos. Ce sont des plats préparés le jour même sur place dans les cuisines même du supermarché. Le féculent en est bien évidemment le riz auquel s’ajoutent du poisson ou de la viande, parfois quelques légumes frits et des accompagnements typiquement japonais (algues, fleurs de lotus, radis fermentés…) Ces bentos sont à chaque fois savoureux pour des prix démocratiques soit environ 3 ou 4 € par plat. Comme ce sont des produits destinés à être vendus et consommés le jour même, il est systématique que leurs prix soient diminués de 20 à 50% en fin d’après-midi.

Sur les routes

En chemin, nous croisons très peu de voitures de marques étrangères, tout au plus quelques européennes. Quant aux japonaises, en plus des modèles connus chez nous, circule une gamme de voitures présentes nulle part ailleurs: très compactes, cubiques, plutôt hautes avec un très faible empattement souvent avec un coffre très réduit. Ces dernières représentent environ la moitié du parc automobile. Les moteurs hybrides sont nombreux et rares sont les diesels, rendant les routes et les villes très silencieuses.

Il nous semble qu’une famille japonaise classique ne possède qu’une seule voiture, la deuxième étant remplacée par un vélo souvent à assistance électrique équipé de façon à pouvoir transporter les jeunes enfants et/ou les commissions. Ils sont vraiment très nombreux en ville où combinés avec des transports en commun efficaces et une bonne infrastructure routière les encombrements sont quasiment inexistants.

De manière générale, les japonais conduisent plutôt lentement et très prudemment. Les routes sont sûres et l’on peut voir de jeunes enfants rentrer seuls à pied ou en vélo de l’école.

Les marques

De manière générale, de l’alimentaire à l’électronique, en passant par l’automobile et le vestimentaire, presque tout est de marque japonaise. Quelques exceptions notables: Mc Do, nous avons vu un H&M, Coca Cola reste une marque parmi tant d’autres et côtoie dans les distributeurs de boissons une flopée d’autres breuvages qui nous sont inconnus. Les boissons à base de thé et de café sont très populaires.

Les courbettes

Une autre particularité japonaise est son code de conduite et de bienséance. Ainsi par exemple on ne se serre pas la main et de façon générale on évite tout contact physique. Pour saluer et remercier, on hoche la tête et penche le buste avec une inclinaison d’autant plus importante que ne l’est le respect que l’on veut montrer. Lorsque nous rentrons dans les magasins ou passons devant un agent de sécurité, les bustes s’inclinent à notre approche, parfois de manière tellement exagérée que ça n’a plus rien de naturel. Ne nous leurrons pas, nous ne savons pas ce qu’ils cachent derrière ces masques souriants et ces courbettes.

Néanmoins il reste beaucoup de spontanéité et de gentillesse lorsque certains nous abordent ou encore nous offrent des présents tels une glace, un biscuit, des fruits ou un café sans oublier des petits cadeaux pour Angèle.

Le code vestimentaire

La tradition vestimentaire du kimono chez les femmes est en voie de disparition même si nous en avons croisé quelques uns. L’uniforme pour certains emplois (vendeuses, serveurs) reste de rigueur de même qu’à l’école.

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Personnellement, nous trouvons les enfants du fondamental mignons dans leurs petits costumes et les garçons adolescents plutôt élégants. Par contre, les adolescentes pubères nous paraissent complètement ridicules avec leurs jupes plissées, soquettes blanches et chemisiers blancs à col marin. A nos yeux il s’agit d’humiliation pure et simple mais sans doute ne voient-ils pas les choses de la même façon que nous. En plus, elles semblent emprunter un air niais que nous n’arrivons pas à décoder.

Au travail, la tenue casual n’est pas encore d’actualité au Japon. Les chauffeurs de taxi et de bus sont toujours en costume cravate et portent la casquette d’apparat et les gants blancs. La classe!

La langue

L’obstacle de la langue reste pour nous la plus grande difficulté. Il est bien sûr normal qu’ils utilisent leur langue et leur alphabet mais la méconnaissance quasi générale du moindre mot d’anglais nous complique la communication beaucoup plus que dans d’autres pays. Pour encore moins nous faciliter la vie, aucune indication autre qu’en japonais sur les produits des supermarchés. Pas moyen de savoir si on achète du lait ou du yaourt. Dans les lavoirs automatiques, nous arrivons à laver et à sécher notre linge en appuyant sur les boutons au petit bonheur la chance. Le long des routes, les indications de direction sont souvent également retranscrites en alphabet latin ce qui nous simplifie les choses sans les rendre limpides pour autant 🙂 Vive le GPS !

Le petit coin

Un dernier chapitre attendu avec impatience par certains est celui… des toilettes ! Certaines d’entre elles sont de véritables installations domotiques. À votre approche, le couvercle se soulève automatiquement, un petit parfum est vaporisé, un bruit d’eau qui coule est émis afin d’éviter toute gêne vis-à-vis d’éventuels voisins. La planche est chauffée pour plus de confort. À votre portée, tout un panneau de commande parmi lesquels la petite douchette avant ou arrière suivant la commission, à l’eau tiède bien sûr, homme ou femme suivant votre genre, avec puissance du jet variable. Avant de commencer ce jeu-là, il faut s’assurer de reconnaître le bouton STOP. Quelques secondes après vous être relevé, la chasse est automatique avec une petite lumière dans la cuvette pour en vérifier la propreté.

Et à part ça ?

Après ces quelques spécificités japonaises parmi tant d’autres, passons à un chapitre plus touristique.

Après Hiroshima et quelques jours dans la montagne, nous cyclons la Shimanami Kaïdo qui bien que relativement courte ( +/- 80 km ) est sans doute la route cycliste la plus populaire du Japon. Cette dernière relie l’île d’Honshu à celle de Shikoku via 6 ponts reliant entre elles un chapelet d’îles situées entre les deux principales. La route est très tranquille, presque sans voitures et sans beaucoup de dénivelé si ce n’est pour monter sur les ponts. Le dernier d’entre eux est le plus long pont suspendu du monde avec plus de 4 km. Tous possèdent une voie séparée pour les cyclistes et les piétons.

Après la traversée peu intéressante de l’île de Shikoku le long de sa côte nord, nous repassons sur l’île de Honshu en ferry et débarquons à Kobe. Ses boeufs sont célèbres mondialement mais doivent être bien cachés car nous ne verrons pas un pré ni une seule tête de bétail tant la ville s’étend jusqu’au pied de la montagne.

La zone entre Kobe et Osaka et même Kyoto-Nara est une énorme agglomération s’étendant sur au moins 100 ou 150 km. À Osaka nous repassons quelques jours chez Emy et Koji. En compagnie de Pierre-Loup, un cycliste français logeant aussi chez eux, nous visitons le musée du vélo Shimano à Sakaï dans la banlieue d’Osaka où se trouve la maison mère de la célèbre marque.

Le lendemain, nous visitons le château d’Osaka et son parc ainsi que la célèbre rue commerçante Dotonbori. Nous profitons de notre passage en ville pour entrer dans une salle de “pachinko & slot”. Ces salles de jeux sont de véritables institutions au Japon et on les retrouve vraiment partout dans le pays. Le bruit des billes qui tombent est assourdissant. Fait unique au Japon où la cigarette est plus que découragée, certaines salles sont fumeurs. On y trouve plusieurs sortes d’amusements : machine à sous, jeux vidéo, karaoké, bowling et bien sûr les pachinko.

Dans une rue commerçante, nous tentons de converser avec un petit robot qui impressionne beaucoup Angèle. À nouveau, l’obstacle de la langue est présent et nous ne comprenons pas l’obstination du robot unilingue à nous répéter le mot ‘pepper’. Nous nous contentons de lui serrer la main…

Notre halte suivante est à Nara où nous photographions quelques temples et ses célèbres daims qui ne sont plus sauvages que de nom.

Par la suite nous remontons vers le nord et longeons le lac Biwa assez populaire également chez les cyclistes pour une promenade tranquille enfin hors de la circulation et des grosses agglomérations.

Pour notre dernier mois de balade à 5 roues, nous prévoyons de traverser les Alpes japonaises par Nagano avant de relier Tokyo via le Mont Fuji. Suite et fin de notre voyage au prochain épisode.


Commentaire

Dépaysement japonais — 15 commentaires

  1. Profitez encore un Max de cette merveilleuse expérience.
    Nous vous attendons avec impatience afin de partager avec vous tous ces moments.
    Dan…..vous vous rappelez……..ce moustachu du CBAE…….lol.

  2. De retour d’un petit voyage à vélo d’une 15aine de jour, je le prolonge un peu de façon imaginaire grâce à vos gentils reportages. Merci

    Guy

  3. Nous attendons votre retour avec impatience, bien que vous reste encore un mois à profiter à fond,
    Une mobilisation importante vous attend a votre retour….
    A bientôt et Bizzzzzz de nous deux

  4. Vos récits sont toujours très passionnants et palpitants. Et cette fois, même aller au petit coin semble être une aventure! !!!!! Je vous embrasse !!

  5. J’ai pris le train en cours de route mais c’est super agréable de vous lire…Très chouette de partager ces moments au travers de vos récits!

  6. J’ai trouvé le reportage relatif « Au petit coin » particulièrement savoureux, surtout avec la petite touche humoristique du bouton Stop 🙂 Excellent!!! Au palisir; jp

  7. Dépaysement complet pour ce dernier pays visité …..tout parait être aventure : saluer , circuler , acheter , manger même les  » besoins personnels  » ….étonnant et vous trouvez encore le temps de nous envoyer un très beau reportage . Bisous à vous 3 .

  8. Autre civilisation , découvertes , curiosités , beau pays à voir .
    Très beau reportage encore une fois et merçi pour cela .
    En attendant de vous revoir , profitez bien .

  9. Fameux dépaysement. Pas facile de « décrypter leur code » 😉
    Merci pour tous vos reportages et de nous avoir fait rêver, de partager vos visites, vos rencontres.
    Profitez bien de vos dernières étapes et bon retour.

  10. Bonjour
    J ai aimé me,promener entre vos lignes et vous M avez fait rêver.
    Quel expérience formidable pour vous et votre fille que ce beau voyage

    Encore merci

    Christian

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